SUISSE: PATRIARCAT, DéROBE-toi

de Cora Dubach et Esther Gerber, 10 avr. 2021, publié à Archipel 302

Le collectif de la grève féministe d’Undervelier souhaite vous informer d'une réaction démesurée et inique de la part des autorités jurassiennes après une manifestation pour les droits des femmes.

Le dimanche 14 juin 2020, une action spontanée s'est déroulée à Undervelier dans le Jura suisse, en com-mémoration de la Grève des Femmes du 14 juin 2019. Plus d'un demi-million de personnes avaient défilé dans toute la Suisse. Les revendications portées par les femmes – et aussi quelques hommes – dans les rues ce jour-là restent d'actualité. Par exemple "A travail égal, salaire égal": en 2020, pour le même travail, les femmes ont gagné 14,4% de moins que leurs collègues masculins en Suisse.

En ce dimanche de juin 2020, des vélos ont bloqué la circulation sur la route principale vers 10h pour installer un buffet canadien. Des banderoles au-dessus de la route et des affiches proclamaient les revendi-cations pour une société égalitaire sans discriminations liées au genre. Une trentaine de personnes de tous âges ont participé à cette action symbolique. Une déviation permettait une circulation sans entrave entre Bassecourt et Bienne.

Cet évènement festif a été perturbé une demi-heure plus tard par l'arrivée de deux policiers qui exi-geaient de voir le permis pour cette manifestation. Celui-ci n'existant pas, car l'évènement a été organisé très spontanément, les policiers ont pris contact avec leur supérieur. Ils nous ont alors demandé de libérer la voie dans un délai de 20 minutes. Nous avons obtempéré, ce que les policiers ont pu constater quand ils sont repassés peu après. En accord avec leur supérieur, ils nous ont assuré·es qu'il n'y aurait pas de suite judiciaire.

Quelques semaines plus tard, un appel de la police cantonale annonçait le contraire sans aucune explica-tion. Malgré la coopération et les promesses des policiers sur place, une suite judiciaire aurait tout de même lieu contre les deux personnes qui avaient dialogué avec la police. Huit mois plus tard, une ordon-nance pénale datée du 19 février 2021 condamne celles-ci en vertu de l’Article 6 al. 1 et Article 90 al.1 LCR, Articles 47, 103, 106, CPS et Article 352 ss CPP à des amendes et des frais de 449 francs pour cha-cune d’entre elles.

Hasard du calendrier, à un jour près, c’était le Equal Pay Day en Suisse, une journée d'action pour visibi-liser les écarts de salaires entre femmes et hommes: si un homme gagne son salaire à partir du 1er janvier 2021, pour un salaire identique, une femme travaille de fait gratuitement... jusqu'au 20 février 2021. Nous sommes en Suisse donc encore bien loin de l'égalité et notre lutte continuera.

Un recours vient d'être déposé le 1er mars 2021 contre cette condamnation injuste et ressentie comme misogyne. Dans d'autres cantons aussi, la police et les autorités ont réagi avec une brutalité excessive contre des protestations féministes: https://www.collectif-femmes-valais.ch/actualités

Il est donc d'autant plus important de se défendre contre cette violence disproportionnée des autorités jurassiennes et de la rendre publique. Pour plus d'informations à ce sujet, n'hésitez pas à nous contacter: <montois[at]vtxmail.ch>.