En automne passé, Blaise Compaoré, président du Burkina Faso, était chassé de son poste par une révolte populaire; il s’y était maintenu pendant 27 ans. C’est sa tentative de changement de la constitution pout lui permettre de viser un troisième mandat à la présidence qui a fait déborder le vase.
Le 31 octobre 2014, Compaoré s’est vu contraint de démissionner. Puis il a pris la fuite – avec l’aide de la France – vers la Côte d’Ivoire voisine. Pour la première fois dans l’histoire postcoloniale de l’Afrique subsaharienne, une révolte populaire, en grande partie pacifique, a réussi à empêcher les manipulations de constitution d’un chef d’Etat: voici un signal important à tous les présidents corrompus et ivres de pouvoir sur le continent africain. C’est surtout la jeunesse burkinabée qui s’était levée contre l’abus de pouvoir du président et de son entourage, et leur succès pourrait inspirer les jeunes générations dans d’autres pays.
En octobre 1987, Blaise Compaoré avait commandité, au cours d’un coup d’Etat sanglant, le meurtre du président Thomas Sankara, son ancien compagnon de route. Cet acte odieux était, selon toute vraisemblance, soutenu par l’ancien pouvoir colonial de la France et par l’ancien dictateur de la Côte d’Ivoire.
Thomas Sankara avait mis sur le chemin de l’émancipation ce pays pauvre qu’était la Haute-Volta, dont il s’apprêtait à changer le nom en Burkina Faso (pays des hommes dignes). Il se détournait de l’influence néocoloniale, se fiait aux forces propres de son pays et devenait un symbole pour toute la jeunesse africaine et au-delà.
Après sa mort, Compaoré, le nouveau président autoproclamé, ramena le pays sous la tutelle néocoloniale de la France et en échange, il fut traité en partenaire privilégié. Le président pouvait opprimer son peuple tandis que la France installait une grande base militaire pour ses aventures armées sur le continent africain.
Avec l’appel «En solidarité avec le peuple burkinabé», différents mouvements sociaux, collectifs, organisations et citoyen-n-e-s demandent que justice soit rendue.
Voici des extraits de cet appel:
En solidarité avec le peuple burkinabé
- nous condamnons fermement les actes de la France qui a exfiltré le dictateur Blaise Compaoré;
- nous exigeons la fin de l’impunité et par conséquent, exigeons que Blaise Compaoré soit rendu à la justice du Burkina Faso;
- nous exigeons également que les dignitaires du régime de Blaise Compaoré ne soient protégés dans aucun pays et qu’ils soient également remis à la justice du Burkina;
- nous exigeons que Blaise Compaoré soit jugé pour sa participation dans les différentes guerres de la région, Libéria, Sierra Leone, Côte d’Ivoire, qui ont fait des dizaines de milliers de morts et des centaines de milliers de victimes;
- nous dénonçons et condamnons les politiques françafricaines;
- nous exigeons l’annulation immédiate et sans condition de la dette extérieure publique du Burkina Faso. Cette dette, en vertu du droit international, est largement odieuse et illégitime puisqu’elle a été contractée par un régime dictatorial, à son profit et en toute connaissance des créanciers.
Nous rappelons qu’une demande d’enquête parlementaire est déposée devant le parlement français sur l’assassinat de Thomas Sankara et demandons qu’elle soit mise à l’ordre du jour le plus vite possible et que toutes les archives de l’époque soient accessibles sans restriction.
Nous restons mobilisés avec le peuple burkinabé dans sa conquête de liberté, de justice sociale et de souveraineté.
Parmi les signataires: Mariam Sankara, veuve de Thomas Sankara; Jean Ziegler, vice-président du comité consultatif du Conseil des droits de l’homme de l’ONU; Nouhoum Keita de Radio Kayira à Bamako et du Forum Civique Mali, partenaires de longue date du Forum Civique Européen. La liste des signataires mise à jour est sur <http://cadtm.org/En-solidarité-avec-le-peuple>.