A Riace le dispensaire médical rouvre ses portes C’était la fête à Riace le week-end du 7 au 9 février. Après deux mois de fermeture, imposée par le nouveau maire proche de la Lega, le nouveau dispensaire médical a enfin rouvert ses portes, quelques ruelles plus loin. Dans ce petit bourg, le vent du changement continue de souffler…
Il y a un peu plus d'un an, le 9 février, Alex Zanotelli écrivait ces mots à propos de Riace et de Domenico Lucano: »Il est inconcevable qu’un homme aussi droit et juste soit traité ainsi et que son œuvre soit détruite. Les derniers mois un grand nombre de migrant·es ont dû partir de Riace. Sur trois cents, il en reste soixante. On a voulu démanteler cette œuvre d’accueil et d’intégration, qui aurait pu constituer un exemple pour nombre de situations en Italie. Mais, partout dans le pays, beaucoup d’associations ont décidé de ne pas baisser les bras et se sont retroussé les manches pour faire redémarrer cette expérience, qui est l’antithèse des choix politiques italiens. Ainsi est née la Fondation E’stato il vento, (C’était le vent), une phrase que Lucano utilise souvent pour dire que ce fut le hasard du vent qui a poussé un bateau de réfugié·es kurdes sur la plage de Riace, et donné naissance à tout ce qui a suivi. Cette fondation a pour but de relancer les projets d’accueil à Riace» Un an plus tard, malgré le nombre d’événements douloureux qui ont accablé ce petit bourg calabrais, symbole d’une humanité piétinée, on peut enfin dire que le vent est en train de tourner. Vendredi 7 février, on a pu enfin fêter la réouverture du dispensaire médical créé en 2017, qui soignait gratuitement les migrants, les habitants de Riace et des communes limitrophes. Deux ans de travail intensif dans une zone où les structures sanitaires manquent énormément, et qui était logé dans des locaux communaux mis à disposition par l’administration de l’ancien maire Domenico Lucano. La nouvelle administration, proche de la Lega, avait décidé de fermer la structure, laissant les locaux vides. Le dispensaire offrait des services en médecine générale, pédiatrie, gynécologie et autres consultations spécialisées grâce au réseau professionnel de l’association Jimuel. Si aujourd’hui on a pu ouvrir les portes d’un nouveau dispensaire, en marquant symboliquement le début de la reprise, on le doit à l’association Città Futura, celle qui a initié tous les projets d’accueil au village, mais aussi à la détermination de Domenico Lucano qui, malgré l’acharnement judiciaire contre lui, n’a jamais cessé de défendre les idées autour desquelles cette expérience extraordinaire a pris forme. Sans oublier la générosité de l’association Jimuel, du docteur Isidoro Napoli et évidemment le soutien de la Fondation E’stato il vento. La fondation, née l’année dernière, a aussi permis la réouverture des ateliers artisanaux et a soutenu la mise en route du moulin à huile qui a pu produire déjà cette année une huile d’excellente qualité, appréciée en Italie et à l’étranger. Ce moulin a donné du travail à divers réfugié·es résident·es et aux habitant·es du village. La réouverture du dispensaire médical est un succès supplémentaire, restituant un service indispensable à toute la communauté. Un miracle qui a pu se réaliser grâce à la ténacité de tous, sans subventions publiques, démontrant ainsi que la furie destructrice de la vague noire de haine peut être arrêtée. Certes, ce n’est qu’un début, il reste beaucoup à faire: il faudra acheter de nouveaux appareils médicaux et garantir la continuité du service. La campagne de collecte lancée par la fondation continue, tout comme l’envie de résister qui est propre à cette communauté pacifique, multi-ethnique, rebelle et accueillante.
Roberta Ferruti travaille pour RE CO SOL, le réseau des communes solidaires. Elle est journaliste et vit à Rome.