DOSSIER NO BORDER: No Border en Ukraine

9 mai 2010, publié à Archipel 151

Appel pour un campement «No Border» (contre les frontières) en Ukraine du 11 au 20 août 2007, dans la principale région de migration de transit et de travail du pays: la Transcarpatie.

L’expansion de l’Union Européenne (UE) vers l’Est a déplacé les murs de la «Forteresse Europe» jusqu’à la frontière ouest de l’Ukraine. La région ukrainienne de Transcarpatie, dont les plus grandes villes sont Oujgorod et Mukachevo, est devenue une nouvelle zone frontière qui se militarise de plus en plus. C’est là que sont concentrés de nombreux camps de détention pour des refugié-e-s qui viennent des pays du «Sud» et de l’ex-URSS pour tenter de fuir la guerre, le totalitarisme ou la misère en venant dans les pays de l’UE. Il est difficile de trouver des informations sur les conditions à l’intérieur de la majorité de ces camps.

La situation des réfugié-e-s en Ukraine est très précaire: leur liberté de mouvement est restreinte, il leur est difficile de trouver du travail, d’avoir accès aux soins médicaux, et ils et elles n’ont pas de sécurité sociale. Quand on obtient le statut de réfugié-e, le seul soutien que l’on obtienne du gouvernement est un unique et modique don de 3 euros. Au cours des dernières années, l’Ukraine a même extradé des demandeurs d’asile vers des pays tels que l’Ouzbékistan, où ils ont été emprisonnés pour des années dans les fameux goulags de ce régime autoritaire.

Le renforcement des contrôles aux frontières a un gros impact sur la vie dans une région touchée par la crise telle que la Transcarpatie. La région est située à l’intersection des frontières de cinq pays: l’Ukraine, la Slovaquie, la Pologne, la Hongrie et la Roumanie. Quatre d'entre euxfont désormais partie de l’UE, mais l’Ukraine n’en sera pas membre de sitôt. Donc la «Forteresse Europe» renforce ses frontières Est, à l’ouest de l’Ukraine, alors que plus de la moitié de la population de Transcarpatie travaille à l’étranger. L’Ukraine a annulé le système des visas pour les personnes venant de l’UE, mais celle-ci n’a pas rendu pour autant l’accès aux Ukrainien-ne-s au marché du travail (ou même aux territoires des pays européens) plus aisé. Pourtant il serait difficile d’imaginer par exemple que l’agriculture de l’UE se passe des travailleurs et travailleuses venus d’Ukraine.

Par ailleurs, la Transcarpatie est depuis longtemps une région très spéciale de par son mélange unique de cultures et de traditions. Aujourd’hui, elle devient une des principales voies de migration internationale. Les gardes-frontières, les services de sécurité et les médias, en utilisant un langage xénophobe, contribuent à répandre les préjugés contre les migrant-e-s dans la population locale, ce qui entraîne des tensions de plus en plus fortes dans la région.

Apartheid global

Nous réclamons le droit à la liberté de mouvement pour tout le monde, l’asile pour toutes les personnes persécutées et le droit de migrer des régions touchées par le sous-emploi vers d’autres pays, si cela peut améliorer leur vie. Nous réclamons l’abolition de tous les systèmes de visas. Nous voulons faire s’effondrer la Forteresse Europe, et avec elle le système des frontières qui a mené au meurtre cautionné par l’Etat de milliers de personnes aux frontières ces dernières années. La politique d’«apartheid global» doit cesser!

Les camps No Border

Nous nous inscrivons dans la tradition des camps No Border1 organisés sur les frontières est de la forteresse Europe – en 1998, 99 et 2000 aux frontières de l’Allemagne et de la Pologne, en 2000 et 2003 à la frontière est de la Pologne, en 2001 en Slovénie, en 2003 en Roumanie, en 2003 et 2005 à la frontière entre Grèce et Bulgarie, et en Finlande en 2004. Des camps ont aussi été organisés aux frontières sud de l’Europe (en Sicile en 2000 et à Tarifa en Espagne en 2001), à l’intérieur de l’Europe près des aéroports et des centres principaux du système de surveillance et de décision (comme à Strasbourg en 2002), à la frontière entre le Mexique et les USA, ainsi qu’en Australie. Cette année notre mouvement international fait un nouveau pas en avant, puisque le camp en Ukraine sera le premier à être organisé sur le territoire de l’ex-Union Soviétique.

Objectifs Certains des objectifs de ce camp sont:

  1. de créer un terrain de communication entre les activistes d’Europe de l’Est et de l’Ouest, et de partout ailleurs: se rencontrer, établir des contacts, échanger des compétences, des savoirs, des expériences, etc. (ateliers, discussions, entraînements pratiques, concerts, et plus encore...);

  2. d’attirer l’attention des gens en Ukraine (mais aussi en Russie et dans le monde entier) sur la politique raciste d’immigration, de soulever la question des formes contemporaines de racisme et de xénophobie;

  3. de créer des contacts avec les gens vivant en Transcarpatie: éducation anti-raciste, événements ouverts au public, projections de films, expositions, concerts et discussions, dans le but d’améliorer les attitudes des gens vivant dans la région envers les migrant-e-s, les réfugié-e-s, et les demandeurs/euses d’asile;

  4. d’échanger des informations entre nous: comment les autorités des différents pays criminalisent-elles les migrations? Quelles sont les situations dans les prisons de déportation (centres de rétention...)? Et de partager les expériences de résistance dans différents pays. Un des résultats concrets de ce camp sera la publication d’une brochure avec des informations de divers pays à propos de tous ces sujets afin de renforcer nos luttes.

  5. de faire en sorte que plus de personnes des collectifs et mouvements anti-autoritaires d’Ukraine, de Russie et d’autres pays «post-soviétiques» s’impliquent dans les questions liées à la migration, de mobiliser les gens pour lutter contre le racisme, la criminalisation de la migration, et le système des camps de déportation.

Un camp de

communication

Nous discuterons des possibilités, et nous ferons peut-être des actions (mais pas à proximité du camp, toutes les personnes connaissant la région ayant suggéré que la moindre action confrontationnelle faite par des activistes d’«ailleurs» sur un sujet si sensible pourrait empirer la situation). Ce ne sera donc pas un camp d’action mais un camp de communication, de mise en réseau, de programmation et d’éducation populaire. Un autre événement aura lieu au sein de ce camp: un rassemblement international de Food Not Bombs 2. Il y a une explosion des activités de Food Not Bombs en Europe de l’Est. Rien qu’en Russie, il y a une cinquantaine de groupes qui font régulièrement des actions. Nous avons déjà commencé à mettre en place un programme d’ateliers, discussions, entraînements pratiques, etc. Mais nous préférons que le programme se fasse avec les gens qui viendront. Alors si vous avez quelque chose à partager, ou une contribution à apporter, s’il vous plait faites-nous le savoir maintenant! Cela peut concerner tous les sujets qui vous intéressent, pas uniquement le thème principal du camp. Sachez que l’Ukraine a supprimé le système des visas pour les citoyens de l’Union Européenne, des USA et d’autres pays. Alors si vous avez un passeport d’un pays occidental, vous n’avez probablement pas besoin de visa pour nous rejoindre.

Pour participer

Si vous avez des questions ou voulez rejoindre la préparation, nous aider à construire le camp la semaine précédant son commencement, et, le plus important, si vous voulez participer à la mise en place du programme en proposant des ateliers, discussions, entraînements pratiques ou quoi que ce soit, n’hésitez pas à nous écrire: <noborder2007 (at) riseup.net>.

Aidez-nous à diffuser cet appel le plus largement possible!

Réseau No Border

1.Voir Archipel no 92, mars 2002 Appel du Réseau No Border , no 97, septembre 2002, Camp international No Border de Strasbourg , no 117, juin 2004, Camps de réfugiés aux nouvelles frontières extérieures <www.forumcivique.org>

  1. De la nourriture, pas des bombes, collectifs de distribution de repas gratuits dans les rues, réseau présent dans de nombreux pays (ndlt)