La situation sur la décharge de Vuèjak, transformée par les autorités de la ville de Bihaæ en camp de réfugié·es dans le nord-ouest de la Bosnie-Herzégovine, s’aggrave dramatiquement. Une catastrophe humanitaire annoncée avec l’augmentation du nombre de personnes en migration sur la route des Balkans, l’approche de l’hiver et la baisse des températures.
Nous avons déjà parlé de ce camp de fortune dans le N° 284 d’Archipel. Vuèjak est à deux kilomètres de la frontière croate et les réfugié·es tentent de passer la frontière pour se rendre en UE. Cependant, leurs tentatives aboutissent généralement dans les griffes des autorités frontalières croates, qui les brutalisent impitoyablement et les renvoient en Bosnie. Sur le site internet du Forum Civique Européen, vous trouverez plusieurs reportages qui documentent ces refoulements illégaux.
Les conditions de vie des migrant·es dans la décharge sont si catastrophiques que certaines organisations humanitaires refusent d’y travailler. Au cours des derniers mois, des volontaires de la Croix-Rouge locale distribuaient quotidiennement plusieurs centaines de repas ainsi que des vêtements. L’équipe médicale bénévole autour du journaliste allemand Dirk Planert, fournissait jusqu’à deux cent soins d’urgence par jour. Elle aussi a été contrainte, il y a quelques semaines, de cesser de fournir cette aide. Les volontaires ont été harcelé·es par les autorités locales, condamné·es à des amendes de 150 euros et les activistes étrangèr·es ont été expulsé·es. Ici aussi, la solidarité est criminalisée. Aujourd’hui, au moment de la rédaction de cet article, le maire de Bihaæ a l’intention d’interdire l’approvisionnement en nourriture de la Croix-Rouge et de laisser les 2000 personnes du camp complètement dans la misère. Il prétend ainsi mettre sous pression le gouvernement central de Sarajevo. Heureusement, le jeu cynique des autorités bosniaques et du maire de Bihaæ ne passe pas inaperçu à l’étranger. Plusieurs manifestations ont eu lieu à Vienne et ailleurs, aussi pour dénoncer la responsabilité de l’UE dans cette misère.
Au cours de l’été, le FCE a organisé une campagne de lettres au gouvernement suisse pour exiger de ne plus renvoyer de réfugié·es en Croatie et en Bosnie, de fournir un soutien matériel et logistique à la Bosnie-Herzégovine pour l’accueil des réfugié·es et surtout, d’œuvrer pour mettre fin immédiatement aux traitements cruels infligés par les autorités croates à leurs frontières. Mille personnes ont écrit à la conseillère fédérale Karin Keller-Suter. En parallèle, les trois conseillers nationaux Samira Marti, Mattea Meyer et Balthasar Glättli ont soutenu cette action en formulant plusieurs questions et interpellations parlementaires. Illes ont exigé une contribution concrète des autorités suisses à la solution de cette crise. Les réponses du Département fédéral de justice et police, dirigé par Mme Keller-Suter, sont totalement insatisfaisantes et d’autres mesures sont en préparation par ces député·es au Parlement. De plus, une décision importante du Tribunal administratif fédéral a été rendue le 12 juillet, critiquant le Secrétariat d’Etat aux Migrations (SEM) et suspendant le renvoi d’un demandeur d’asile syrien vers Zagreb, prévu selon les accords de Dublin. Le SEM doit donc procéder à un examen plus détaillé de la situation des droits humains en Croatie. Même des conseillers nationaux de droite ont dû admettre qu’à l’avenir, des renvois vers la Croatie ne devraient plus être exécutés sans examen approfondi.
Les élections de renouvellement du parlement suisse du 20 octobre ont entraîné un affaiblissement sensible de l’UDC et du PLR (les deux principaux partis de droite) et un renforcement considérable de la représentation des femmes et des Verts. Il faut espérer qu’avec ce nouveau parlement, les considérations humanitaires, des droits humains et de justice ne seront plus systématiquement reléguées au second plan, derrière les raisonnements commerciaux et économiques.