Peu avant Pâques, le 29 mars 2021, la coalition #evacuerMAINTENANT et Amnesty International a organisé à Berne une conférence de presse et une action symbolique pour protester contre l'immobilisme de la politique fédérale et pour un accueil mas-sif de migrant·es des îles grecques. Suivent des extraits du communiqué de presse et de l'intervention de Claude Braun, membre du FCE.
Les villes, les communes, les églises et une grande partie de la société civile sont prêtes à accueillir des réfugié·es. Quand le Conseil fédéral les entendra-t-il enfin?
La Suisse peut et doit faire plus! Il y a un an déjà, 132 organisations et plus de 50.000 personnes ont ap-pelé le Conseil fédéral à évacuer les camps de réfugié·es grecs en accueillant un large contingent de per-sonnes en quête de protection avec l'appel de Pâques,
Depuis, la Suisse officielle se contente de répéter qu'elle souhaite améliorer les conditions de vie des po-pulations en apportant une aide directe sur le terrain. Fabian Bracher, membre de la campagne #evacuer-maintenant, vit et travaille sur l'île de Lesbos et affirme clairement que cette promesse n'a pas encore été tenue: "Aujourd'hui, les gens vivent dans un nouveau camp qui a été installé sur un ancien champ de tir. Le sol est empoisonné par le plomb et présente des risques importants pour la santé." Le camp n'est pas raccordé à l'eau et ne dispose pas d'une alimentation électrique adéquate. "Les personnes vulnérables, les malades chroniques, les personnes en situation de handicap physique et les personnes atteintes de cancer vivent dans les tentes du HCR (1) sur un sol froid", déclare Fabian Bracher.
De nombreuses offres ignorées
De nombreuses villes suisses ont également réagi avec inquiétude aux conditions de vie dans les camps grecs: au début de l'été 2020, elles se sont regroupées au sein de l'Alliance des villes et communes pour l'accueil des réfugié·es. Les 16 villes et communes actuellement concernées souhaitent que la Suisse accueille davantage de réfugié·es et se sont dites prêtes à accueillir ces personnes supplémentaires. En outre, une vingtaine de petites communes se sont déclarées prêtes à accueillir des réfugié·es, indépendamment de l'alliance.
"Les villes de l'Alliance qui sont prêtes à accueillir des réfugié·es ont déjà effectué plusieurs démarches auprès du Conseil fédéral", déclare Thierry Steiert, maire de Fribourg. "Mais nos offres sont toujours restées lettre morte". La conseillère municipale bernoise Franziska Teuscher déclare que l'Alliance est consciente que la politique d'asile est de la responsabilité du gouvernement, mais: "En collaboration avec le Conseil fédéral, les villes veulent trouver des moyens pragmatiques de mettre en œuvre un accueil supplémentaire de réfugié·es et une répartition de ces personnes entre les villes et les communes qui sont prêtes à les accueillir. Ceci pour atténuer les difficultés à court terme, mais aussi dans le cadre d'une évolution à plus long terme de la tradition humanitaire de notre pays." Raphael Golta situe principalement un manque de volonté politique au niveau fédéral. Pour le responsable des affaires sociales de la ville de Zurich, c'est clair: "Lorsque l'aide sur le terrain atteint ses limites, nous devons accueillir les personnes touchées dans notre pays." Il est vrai, dit-il, que la Suisse ne peut pas, à elle seule, atténuer toutes les difficultés qui se posent sur les routes migratoires mondiales. "Mais nous pouvons faire beaucoup plus que ce que nous fai-sons aujourd'hui".
Les Eglises se tiennent prêtes
En cas d'accueil supplémentaire de réfugié·es, la Confédération recevrait également le soutien des Eglises. Franziska Driessen-Reding, présidente du Conseil synodal de l'Eglise catholique du canton de Zurich, déclare: "L'accueil des personnes qui fuient fait partie de l'ADN des églises chrétiennes, et pratiquement de leur mission fondamentale. En tant que chrétiennes, nous devons aider les réfugié·es sans clarifier d'où illes viennent et s'illes peuvent donner des raisons 'justifiées' à leur fuite." L'Eglise catholique du canton de Zurich est prête à faire sa part, a-t-elle déclaré. "Le canton sait que nous sommes disponibles. Il appartient au gouvernement fédéral de donner enfin un signe d'humanité. Nous serons prêtes en tant qu'églises." Enfin, les collectifs de grève des femmes expriment aussi leur inquiétude. Conscients que les personnes particulièrement vulnérables dans les camps de réfugié·es grecs sont exposées à "des menaces et des violences psychologiques, physiques et sexuelles massives", les collectifs soutiennent clairement les demandes d’#evacuermaintenant.
Les tactiques dilatoires doivent cesser
L'équipe de campagne d'#evacuermaintenant est déçue de l'attitude passive du Conseil fédéral. En plus des revendications formulées dans la pétition, elle a envoyé de multiples pistes de solutions au Secrétariat d'Etat aux migrations et au Conseil fédéral. "De possibles vols d'évacuation, des logements civils dispo-nibles et la volonté de nombreuses villes et communes suisses d'accueillir des réfugié·es n'en sont que quelques exemples", explique Janine Bleuler. Pour elle, c'est clair: "Cette tactique dilatoire de la Confédération doit cesser!" Et Fabian Bracher d'ajouter: "Une réorientation de la politique migratoire européenne est nécessaire, une politique axée sur la solidarité, l'humanité et le respect inconditionnel des droits humains." La solidarité des villes et des communes est un moyen essentiel pour faire évoluer la situation à cet égard, ajoute-t-il.
Intervention de Claude Braun
Après le lancement de l'Appel de Pâques 2020, les huit plus grandes villes de Suisse s'y sont jointes pour soutenir l'évacuation des réfugié·es des îles grecques. Plus tard, huit autres villes se sont ralliées à cette Alliance qui compte donc aujourd'hui seize villes. En parallèle, le FCE a formulé une pétition aux communes suisses (2) qui a été diffusée aussi par d'autres organisations telles que Solidarité sans frontières, Vivre Ensemble et d'autres. Des milliers de personnes ont signé cette pétition et demandé à leur commune de se joindre à l'Appel. Le résultat est, qu'en plus des 16 villes de l'Alliance, 20 communes se sont engagées à participer à un accueil accru des réfugié·es des îles grecques. Il s'agit de petites et grandes communes de presque tous les cantons. Vous trouverez ci-dessous la liste complète. Les deux plus petites communes sont Cormoret (BE) avec 491 habitants et Penthalaz (VD) avec 3283.
Dans leur déclaration, les communes s'exprimaient d'une façon différenciée. Sevelen en Suisse orientale, par exemple, a explicitement calculé le nombre de personnes qui pourraient être accueillies: "(...) Des clarifications internes ont montré qu'à moyen terme, une famille pourrait être accueillie en plus du quota existant. Actuellement, 38 demandeur·euses d'asile et réfugié·es vivent à Sevelen". Alors que la plupart des autres décisions engageaient les communes de participer à un accueil accru des migrant·es des îles grecques.
Pour terminer, j'aimerais citer une petite commune valaisanne: "Il ne relève pas de notre compétence de prendre la décision d'accueillir des réfugié·es sur notre territoire. Cependant [...] chaque membre du Con-seil communal a décidé de faire un don de 100 francs qui sera versé d'ici à la fin de l'année auprès d'une association caritative."3
Je rappelle, un peu plus sérieusement, que la ville de Wil (SG) où Mme Keller-Sutter commença sa carrière politique dans les années 1990, a rejoint l'Alliance des villes et fait ainsi preuve de bien plus d'humanité et d'intelligence que la Conseillère fédérale. En plus du manque cruel d'humanité du DFJP et du SEM envers cette tragédie, nous déplorons le refus de dialogue et de discussion avec les communes de la part de la Berne fédérale. Nous espérons que cet événement encourage Mme Keller-Sutter et M. Gattiker à changer de cap.
Article compilé par Claude Braun, FCE-Suisse
- Agence des Nations Unies pour les réfugiés
- https://forumcivique.org/fr/artikel/aufruf-an-die-geminden-nehmt-gefluechtete-von-den-griechischen-inseln-auf/
- Lettre de la municipalité de Grimisuat du 6.11.2020