Ouverture du Local "Ascen Uriarte" à Nijar

de Nicholas Bell, FCE France, 28 mai 2010, publié à Archipel 150

Nous étions nombreux à reprendre la longue route vers la province andalouse d’Almeria afin de fêter avec nos amis du SOC (Syndicat des Ouvriers agricoles) l’ouverture du nouveau local syndical à San Isidro, près de Nijar, qui a eu lieu les 27 et 28 avril dernier.

Aux côtés de quatre membres du FCE, il y avait des militants de la Confédération Paysanne, de divers syndicats suisses (SIT, UNIA, l’Autre Syndicat), de la Plate-Forme pour une Agriculture socialement durable, du Collectif de Défense des Travailleurs Etrangers dans l’Agriculture provençale (CODETRAS), de la Fédération des Paysans de montagne autrichiens, des chercheurs et des journalistes. C’est grâce à l’appui financier international, notamment du FCE et du Solifonds, que le SOC a pu acheter ce centre.

Depuis quelques années on a pu constater une grande expansion des serres dans le «Campo de Nijar» dans la «Levante», une vaste zone aride à l’est d’Almeria, la «Poniente», à l’ouest de la capitale provinciale (la région autour d’El Ejido) étant saturée. On y trouve environ 10.000 à 15.000 hectares de serres et au moins 20.000 immigrés, toujours pour la majorité sans papiers et sans contrat. A Nijar il y a encore moins de bars, magasins ou «locutorios» (centres téléphoniques) qu’à El Ejido, où les immigrés peuvent se retrouver. Le local devra donc jouer un rôle important, mais la tâche ne sera pas facile. Les ouvriers migrants sont fortement dispersés, vivant dans des conditions d’une extrême précarité. La communauté des immigrés est très peu stable, car la plupart des migrants cherchent à quitter cette zone maudite pour retrouver des emplois moins ingrats ailleurs. Le SOC n’a que cinq permanents (deux Marocains, un Sénégalais, un Argentin et une Espagnole) dans une province où l'on estime à plus de 100.000 le nombre de travailleurs immigrés.

Nous avons profité de notre voyage pour évoquer ces problèmes avec l’équipe du SOC et définir les priorités pour l’année à venir. Il semble évident que le besoin le plus urgent est d’augmenter le nombre de permanents qui pourront agir dans les différentes zones de cette mer de plastique. C’est ainsi que le SOC pourrait créer une dynamique qui assurera, à plus long terme, l’autofinancement du syndicat, grâce aux adhésions des membres.

Dans les débats lors de l’inauguration nous avons abordé de nombreux thèmes, y compris les terribles ravages causés à l’environnement et aux aquifères par ce système de production ultra-intensive, les abus et aspects pervers des «contrats d’origine» introduits ces dernières années en Espagne pour «réglementer le marché du travail», la situation dans les pays d’origine… Le SOC prévoit de publier un rapport sur ces journées.

Il reste à dire que nous étions très émus lorsque nos amis du SOC ont annoncé que le local portera le nom d’Ascen Uriarte, qui est sans doute celle au sein du FCE qui a le plus œuvré depuis les années 1980 pour bâtir nos relations d’amitié et de solidarité avec le SOC. Elle s’est fortement impliquée pour comprendre et faire connaître en Europe la réalité des journaliers agricoles andalous et immigrés. Elle nous a soudainement quittés en février 2006, deux mois après l’ouverture du premier local à El Ejido.

Afin de vous donner un aperçu de ce que nous avons pu ressentir lors de ce voyage, nous avons choisi de vous présenter le dossier rédigé par Nicolas Arraitz pour le journal CQFD à Marseille. Il a partagé ces moments forts avec nous pendant une semaine.