SUISSE: Quand les victimes sont au banc des accusés

7 mai 2010, publié à Archipel 138

Le 3 avril, deux requérants d’asile algériens sans-abri meurent à Bâle. Pendant que la richesse extravagante et arrogante de ce pays est étalée dans les rues de Bâle lors de la foire internationale des montres et de la bijouterie, deux hommes désespérés cherchent un toit de fortune pour passer la nuit et se réfugient dans un cabanon de jardin. Pour se réchauffer, ils allument un feu avec un grill et meurent, asphyxiés par la fumée du charbon.

La vie de ces deux êtres humains ne vaut même pas dix lignes pour les journaux. Le summum de la froideur: il est question de l’entrée illégale dans le cabanon, il est même question de cambriolage. Certaines victimes deviennent vite des malfaiteurs.

Ces deux décès ne sont pas dûs au hasard ou à la malchance. Ils résultent d’une logique de dissuasion impitoyable. Le but de la politique d’asile suisse consiste explicitement à rendre le séjour en Suisse inattractif pour les requérants. Pas si étonnant, puisque le ministre responsable de ce dossier revendiquait dans le temps sa sympathie pour le système d’apartheid sud-africain et se moque des jugements de tribunaux et de la constitution quand ceux-ci ne lui conviennent pas.

Pour marquer notre colère face à cette hypocrisie, nous participons cette année aussi à l’organisation d’une manifestation nationale lors de la journée des réfugiéEs sous la banièree «La Suisse c’est nous. Personne n’est illégalE»

L’été dernier, notre intention de transformer la gentille journée des réfugié-e-s avec ses stands de kebabs, rouleaux de printemps et danses folkloriques en manifestation mordante contre la politique de Blocher n’était, d’entrée, pas évidente. Le comité d’initiative pour la manif était bien petit – nous n’étions pas plus de dix. Mais pour finir, nous n’étions pas loin de 10.000 à crier, parler, chanter et discuter dans les rues de Berne le 18 juin dernier. L’effort en valait largement la peine. C’est pourquoi le comité d’initiative a décidé de poursuivre cette tentative de transformation de la journée des réfugiéEs jusqu’à ce que ledit ami de l’apartheid disparaisse de son poste.

C’est pourquoi nous vous appelons de nouveau à venir à Berne le 17 juin

Nous espérons que nous serons encore plus nombreux que l’année passée. Après tout, le lancement des référendums contre le durcissement de la loi sur l’asile et sur les étrangers s’est soldé par un premier succès. Plus de 100’000 signataires ont indiqué leur désir que la Suisse s’ouvre à la migration. Pourquoi la manif du 17 juin ne pourrait-elle pas devenir la plus grande manifestation publique pour une Suisse plus ouverte?

Claude Braun - Comité Européen de Défense des Réfugiés et des Immigrés